Institut de l'intelligence artificielle de l'Alberta

L'IA dans la formation aéronautique pour pallier la pénurie de pilotes

Publié

13 janvier 2023

Une importante pénurie de pilotes professionnels est l'un des principaux problèmes auxquels sont confrontées les compagnies aériennes canadiennes aujourd'hui, ce qui a contribué aux récents retards et annulations qui ont affecté le secteur aérien. Une entreprise de Calgary étudie comment l'intelligence artificielle peut contribuer à la création d'une plateforme permettant d'atténuer cette pénurie en formant les pilotes plus rapidement et plus efficacement.

Delphi Technology Corp. travaille avec deux professeurs de l'Université de l'Alberta pour développer un cours de formation virtuel qui vise à réduire le temps et le coût nécessaires à la formation des nouveaux pilotes commerciaux. Le partenariat explorera l'intégration du ML dans la plateforme afin de mieux identifier les forces et les faiblesses d'un stagiaire.

Le concept original de la composante d'apprentissage automatique a été développé avec le soutien de l'Amii. Par la suite, Delphi a continué à développer le projet avec les professeurs de l'Université de l'Alberta Carrie Demmans Epp et Matt Taylor; ce dernier est également titulaire d'une bourse et d'une chaire d'IA du CIFAR à l'Amii.

Selon Alan Tay, PDG de Delphi, les compagnies aériennes canadiennes sont confrontées à une pénurie de pilotes commerciaux depuis des années. Il s'agit d'un problème qu'il connaît bien, ayant été pendant 25 ans pilote commercial et militaire, ainsi qu'instructeur de vol.

Le problème s'est considérablement aggravé depuis la pandémie de COVID-19. Face aux interdictions de voyager et à l'absence de demande, de nombreux pilotes et autres travailleurs des compagnies aériennes ont pris une retraite anticipée ou ont quitté le secteur. Aujourd'hui, avec la reprise du trafic aérien, il n'y a pas assez de travailleurs qualifiés pour les remplacer. M. Tay estime que pour retrouver le niveau de trafic aérien d'avant la pandémie, le Canada devrait former des milliers de nouveaux pilotes et autres professionnels de l'aviation.

Ce n'est pas une solution miracle. Cette formation est à la fois longue et coûteuse - elle implique des centaines d'heures d'instruction et de temps passé dans les airs. Selon un aéroclub de Calgary, l'obtention d'une licence de pilote au Canada peut coûter aux étudiants entre 25 000 et 35 000 dollars.

Il faut aussi des gens pour les enseigner. C'est là que M. Tay voit un goulot d'étranglement majeur : le manque d'instructeurs. Il explique qu'il est difficile d'attirer les gens vers ce rôle ; le salaire est souvent bas et le travail est souvent considéré comme peu prestigieux.

"C'est la partie la plus basse de l'écosystème des parcours professionnels de l'aviation commerciale. Personne ne veut être instructeur", dit-il. "Personne ne veut être au sol. Tout le monde veut être dans le grand jet. Vous voulez être dans le ciel."

Pas à l'emporte-pièce

La plateforme de formation virtuelle de Delphi, appelée VR City, vise à soulager le système. Selon M. Tay, l'un des obstacles à la formation des pilotes est que celle-ci se déroule généralement en personne. Les stagiaires se réunissent en grand groupe dans une salle de classe pour recevoir un enseignement. Plus tard dans leur formation, ils passeront également des centaines d'heures en vol avec un instructeur pour s'exercer.

En transférant cette instruction et cette formation sur une plateforme virtuelle, M. Tay affirme que les instructeurs de vol peuvent enseigner à un plus grand nombre de pilotes potentiels dans le même laps de temps. Ils pourront ainsi se consacrer à l'enseignement plus avancé qui doit être dispensé en face à face, ainsi qu'à la validation et aux tests visant à s'assurer que les stagiaires sont qualifiés pour obtenir leur licence.

Delphi s'est associé à l'Université de l'Alberta pour intégrer l'apprentissage automatique dans la plateforme virtuelle afin de la rendre plus réactive aux besoins des élèves. L'un des principaux obstacles à la formation des pilotes est qu'il s'agit souvent d'une approche unique : les stagiaires passent le même temps sur les mêmes sujets. Mais M. Tay fait remarquer que de nombreux pilotes potentiels arrivent avec une expérience préalable. Un mécanicien d'aviation, par exemple, qui souhaite devenir pilote professionnel n'a probablement pas besoin d'une formation aussi poussée sur les aspects mécaniques d'un avion.

Le partenariat avec Demmans Epp et Taylor permettra de construire un modèle qui évaluera les forces et les faiblesses de chaque stagiaire, un peu comme un instructeur humain. Il pourrait aider à identifier les domaines dans lesquels le stagiaire a besoin d'une formation plus poussée, réduisant ainsi les pertes de temps et de ressources.

"Il ne s'agit pas d'un modèle à l'emporte-pièce où tout le monde passe par la même chose", explique M. Tay. "Il est capable de nous aider à évaluer le niveau de compétence d'une personne, comme n'importe quel autre instructeur."

Delphi développe actuellement la plateforme et travaille avec les régulateurs de l'aviation pour approuver le processus de formation. Les règles relatives à la formation des pilotes de jets sont naturellement strictes et complexes, et M. Tay estime que le processus est lent. Mais l'entreprise a déjà connu un certain succès : l'Agence européenne de la sécurité aérienne a approuvé l'utilisation d'une technologie similaire pour la formation des pilotes. L'entreprise est actuellement en pourparlers avec les autorités aéronautiques du monde entier.

"Nous travaillons avec le système, pas autour du système", dit-il.

Bien que l'accent ait été mis sur la formation des pilotes, M. Tay indique que le programme de formation virtuelle s'étend à d'autres emplois dans l'aviation et l'aérospatiale, notamment les mécaniciens et les agents de bord. Delphi adaptera bientôt sa plateforme de formation à d'autres secteurs, comme les musées, les soins de santé et la fabrication.

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