Une collaboration entre le Dr Osmar Zaïane, boursier Amii et titulaire de la chaire d'IA de l'ICRA au Canada, et l'un de ses anciens étudiants a débouché sur une nouvelle application d'apprentissage automatique qui pourrait aider à protéger les gens et les espèces en voie de disparition en Inde contre les feux de forêt. Ces travaux ont donné lieu à un article publié dans la revue IEEE Transactions on Emerging Topics in Computational Intelligence.
Cette collaboration est née d'une conversation que Zaïane (professeur à l'Université de l'Alberta) a eue avec Abhishek Srivastava, de l'Indian Institute of Technology Indore, alors que ce dernier était en visite à l'Université de l'Alberta. M. Srivastava travaillait sur un projet visant à mettre en place des capteurs d'incendie sans fil dans la réserve de tigres de Melghat, dans le centre de l'Inde, et a demandé à Zaïane si elle était intéressée par une aide.
"J'ai vraiment aimé l'idée", dit Zaïane. "C'était une chance de préserver les tigres, d'avoir un impact".
Lutter contre les fausses alertes incendie
La réserve de tigres de Melghat est une région accidentée, à peine plus petite que la Belgique, marquée par d'innombrables ravins et falaises abruptes. La réserve abrite des dizaines d'espèces vulnérables, notamment des tigres du Bengale, des panthères, des paresseux, des singes et des oiseaux. C'est également là que vivent des milliers de personnes dans de petits villages qui dépendent de la nature environnante pour survivre.
La région est également sujette à des incendies dévastateurs, en particulier pendant les chauds mois d'été. Il faut parfois des heures ou des jours pour qu'un incendie soit repéré et que les pompiers soient dépêchés sur place. Pendant ce temps, le brasier peut atteindre une taille considérable.
M. Srivastava pense qu'un réseau de capteurs sans fil pourrait détecter et signaler les incendies plus rapidement. Toutefois, les capteurs sont vulnérables aux faux positifs : un phénomène aussi simple que la lumière du soleil qui éclaire directement un capteur peut l'amener à signaler un éventuel incendie.
C'est là que Zaïane a vu une opportunité pour l'apprentissage automatique. Il a collaboré avec l'équipe de Srivastava pour créer un algorithme qui pourrait être entraîné à faire la différence entre un faux positif et un véritable incendie. Moins de fausses alarmes signifie moins de pression sur le système et moins de ressources gaspillées à envoyer des équipes combattre des incendies qui n'existent pas.
Le terrain accidenté et les communications limitées rendent difficile le repérage des feux dans la réserve (Photo : Melghat Tiger Project).
Faire plus de travail avec moins de puissance
L'élaboration de l'algorithme n'a pas été une tâche facile : les capteurs sans fil utilisés à Melghat sont de petites machines qui fonctionnent sur batterie et ont une connectivité limitée. L'algorithme devait être léger et efficace, car un traitement trop important aurait épuisé l'énergie des capteurs.
"Ce n'est pas comme un ordinateur que vous utilisez à la maison... il n'y a pas d'électricité dans la forêt. Une fois que vous l'avez mis là-dedans, vous voulez qu'il dure. Vous devez préserver l'énergie autant que possible."
Malgré ces limites, l'équipe a obtenu des résultats impressionnants, du moins en laboratoire. Zaïane a déclaré que malgré la puissance de traitement et la batterie limitées des capteurs, leur algorithme a pu fonctionner sans sacrifier la précision.
L'objectif est que le système fonctionne aussi bien dans les conditions extrêmes de la réserve de tigres. Selon M. Zaïane, si c'est le cas, la même approche légère pourrait être utile dans d'autres "environnements contraints" : surveillance de l'environnement, voyages dans l'espace et autres endroits où il n'est pas facile de simplement transmettre des données et de remplacer les piles.
Avec Srivastava, les étudiants de l'ITT Indore Prarthi Jain et Seemandhar Jain ont travaillé sur le projet. L'équipe espère mettre en place les capteurs pour tester l'algorithme dans des conditions réelles, mais elle a été retardée par la pandémie.
Lire l'article pour en savoir plus sur les travaux.